Vache folle ou alimentation "durable" ?
Différents scandales alimentaires éclatent sporadiquement en Europe. Récemment, des millions d’œufs frelatés à l’insecticide Fibronil ont été retirés de la vente. Aujourd’hui, on reparle de farines animales. *
La crise de la « vache folle »
La fin du 20ème siècle, a été marquée par la maladie de la vache folle, appelée encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), qui, transmise à l'homme, est responsable d’une maladie neurodégénérative, la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
L’utilisation de farines animales pour nourrir le bétail en était la cause. Les vaches folles avaient mangé de la farine de vache, de porc, de volaille. En effet, les farines animales en question, ce sont des restes d’abattoirs, viande et os, réduits en poudre. Le profit fou pour vache folle ?
Résultat : des milliers de vaches abattues, et ces farines interdites comme aliment d’élevage depuis 2001 dans l’Union Européenne. Depuis, l’élevage européen importe massivement du soja, notamment du Brésil, qui n’hésite pas à détruire la forêt amazonienne pour produire toujours plus.
Sorties par la porte, les farines animales reviennent par la fenêtre**
Les farines animales reviennent, mais elles s’appellent désormais PAT, Protéines Animales Transformées. Depuis le 1er juin 2013, les farines de poisson, de porc et de volailles sont autorisées par l’Union Européenne dans l'alimentation des poissons d’élevage.
Dès 2022, la farine de porc sera autorisée pour les poulets et la farine de poulet pour les porcs. Toute farine de bovin reste encore interdite. Contrôles vétérinaires, stérilisations par chauffage à 180° pendant 3 heures, 25 des Etats membres de l’Union Européenne ont voté pour, seuls les experts de France et d’Irlande se sont abstenus.
Sauf que l’Europe n’a pas mis en place les moyens humains et financiers d’assurer les contrôles, et de faire respecter les règles ci-dessus. Le scandale récent de la fraude sur la viande de cheval ( 2013 : de la viande de cheval vendue comme viande de bœuf) montre que les filières agroalimentaires animales, malgré des « assurances » de traçabilité « de la fourche à la fourchette », restent en réalité mal contrôlées.
Réautoriser les farines animales, en les drapant de « vert », c’est défendre une agriculture intensive, tout le contraire d’une agriculture « durable »
Un feu « vert » aux farines animales ne fait pas une agriculture « verte ». Pollutions, déforestations, appauvrissement de la diversité agricole, recherche extrême de profits forment une spirale infernale. Depuis des années, les politiques de soutien à l’agriculture, qu’elles soient européennes, nationales ou infranationales ont incité à l’agrandissement des fermes, à la spécialisation voire à l’industrialisation des productions, à l’instar des mécanismes de marchés*** .
A contrario, des agriculteurs soucieux de développement durable s’organisent. Par exemple, le réseau CIVAM (Centres d'initiatives pour valoriser l'agriculture et le milieu rural) mène des actions sur la durabilité des systèmes de production, sur la transition vers des systèmes plus autonomes et sur de nouvelles formes de solidarité alimentaire en France.
De son côté, l’Ifremer, l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer, travaille sur des farines de larves d’insectes pour les poissons d’élevage.
Il dépend des consommateurs que nous sommes de faire valoir nos préférences. Sur les poissons et viandes d’animaux nourris aux farines animales, la même vigilance et le même degré que sur les OGM doit s’imposer. La mention « sans farines animales » doit avoir le même statut que « sans pesticide » ou « sans OGM ». En particulier dans les cantines des écoles et du collège de la Ville.
Suzanne Bourdet Michel Faye
* https://www.rtbf.be/info/economie/detail_les-principaux-scandales-alimentaires-en-europe?id=9681380
** http://www.slate.fr/tribune/69619/farines-animales-europe
*** CIVAM : https://cloud.inpact35.org/rad/s/NNPwRPk2qcBKenk
Image: https://ici.radio-canada.ca/actualite/semaineverte/ColorSection/agriculture/031109/farine.shtml
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