Chaudron maléfique ou bonne santé pour tous?
Recette du chaudron maléfique
3 cuillerées de chlordécone, ce pesticide cancérogène (cancers de la prostate) et à très longue durée de vie. Ça, c’est pour « protéger » les bananeraies contre des charançons. Chlordécone interdit depuis 1975 aux Etats-Unis, depuis 1990 en France. Mais la France a accordé alors 3 ans de dérogation aux Antilles. Le chlordécone a contaminé plus de 90% des adultes aux Antilles. La Martinique détient le record mondial des cancers de la prostate.
4 pincées de pesticides néonicotinoïdes, tueurs d’abeilles et perturbateurs endocriniens pour l’homme (troubles de la thyroïde, troubles de la fertilité …). Les PPP, c’est le nom de code des pesticides, joliment renommés Produits Phyto Pharmaceutique . Vous connaissez la pharmacie qui soigne les maladies, voici la pharmacie de notre agriculture intensive, qui pollue notre air, notre eau, notre nourriture. Ces pesticides bénéficient en 2023, pour la 3ème année consécutive, d’une dérogation pour les cultures de betteraves à sucre en France, malgré les engagements, non tenus, d'interdiction.
Enfin 95 grammes de sucre, ce qui est consommé en moyenne par jour et par personne en France ; ça fait 35 kilos de sucre par an et par personne, alors que la moyenne mondiale est de 20 kg. Bon, trop de sucre, ce n’est pas terrible pour la santé. Mais les industries agro-alimentaires en usent et en abusent : on en trouve presque partout dans notre nourriture, parce que le sucre est un ingrédient bon marché et que le consommateur en est souvent devenu captif. Au détriment de la santé humaine.
Des solutions existent, mais sont encore peu appliquées
Chlordécone *:
Les Antilles commencent à utiliser une agriculture hors-sol pour ne pas subir le chlordécone enfoui dans le sol, et des plantations d’arbres permettant de diluer progressivement la concentration en chlordécone du sol.
Reste à indemniser les multiples victimes de la chlordécone, et là, on est loin du compte.
Néonicotinoïdes**
Les betteraves sont attaquées par les pucerons. Pesticides à la rescousse ? Non, plutôt utiliser des pratiques agricoles douces de paillage et de fertilisation organique, pour contrôler les apports d’azote, c'est-à-dire utiliser des pratiques agricoles plus respectueuses des abeilles et des humains.
Faut-il sélectionner des variétés de betteraves résistantes au virus de la jaunisse ou faut-il changer de méthodes de cultures ? A coup sûr, la combinaison de la culture de la betterave avec d’autres plantes peut réduire l’accès des pucerons aux plants de betterave ou favoriser l’action des arthropodes prédateurs ou parasitoïdes des pucerons.
Mais les dérogations persistent, on l’a vu plus haut.
Sucre*** :
L'industrie agroalimentaire doit aujourd'hui réduire son addiction au sucre, et notre propre addiction du même coup. La réduction du sucre dans les pots pour bébés ou dans les confitures, on s’y est adapté. Pour Hugues Pouget, créateur et pâtissier de l’enseigne Hugo et Victor, « se désintoxiquer du sucre, c’est accepter de consommer différemment ».
Mais les industriels de l’agroalimentaire, la grande distribution, les restaurations collectives (cantines et restaurants), et trop de politiques, tous sont à la traîne.
Aider les Antilles à se décontaminer de la chlordécone, c’est manger des bananes plus saines, et d’autres produits aussi. Faire sortir les betteraviers des nicotinoïdes, c’est sauver les abeilles, sans lesquelles on n’aurait plus de fruits. Consommer des fruits bien muris, en provenance de vergers de proximité, c’est avoir besoin de moins de sucre, et faire moins d’empreinte carbone…
Le résultat vaudra mieux qu’un mauvais café et un muffin trop sucré pris à la sauvette sur un comptoir de gare (d'après un conseil d’Hugues Pouget)****. Bon appétit.
Suzanne Bourdet Michel Faye
* https://reporterre.net/En-Martinique-des-solutions-agricoles-emergent-pour-eliminer-le-chlordecone*
Image et recette d’Hugues Pouget dans son livre Ma pâtisserie authentique: 60 recettes au plus près du goût (éditions Martinière, octobre 2022)
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