Uranium recyclé : le contrat d’EDF avec le groupe russe Rosatom tient toujours
La Hague/ Tricastin/ Sibérie, et retour en France, le grand trajet de déchets radioactifs provenant de nos centrales nucléaires *
Les centrales nucléaires ne produisent pas de CO2, mais elles ne sont pas vertes pour autant : elles réchauffent fortement l’eau des cours d’eau utilisés pour le refroidissement des réacteurs, et elles produisent des déchets radioactifs, dont certains très toxiques et à longue durée de vie.
La France dispose d'usines de retraitement , mais envoie l'uranium de retraitement en Sibérie pour qu'il y soit enrichi et renvoyé en France. Des allers-retour à problèmes.
La France dispose d'assez de ressources en minerai d'uranium naturel. Alors pourquoi faire enrichir l'uranium de retraitement en Russie?
Alors ?
La Hague, étape 1
Le site Orano (ex-Areva) à La Hague traite les déchets provenant des centrales nucléaires, et obtient 3 produits :
- du plutonium qui sert à la fabrication de combustible MOX (mélange de plutonium et d’uranium),
- des déchets hautement radioactifs qui sont vitrifiés et entreposés sur place en attendant « mieux »
- de l’uranium de retraitement sous forme de nitrate d’uranyle. Or, uranium et azote ne font pas bon ménage. Alors ? il est envoyé à Triscatin.
Train transportant des déchets nucléaires
Tricastin, étape 2
Le site de Tricastin (usine TU5) dénitrifie le nitrate d’uranyle (= enlève l’azote). On obtient de l’oxyde d’uranium de retraitement (U3O8 URT) sous forme solide et stable. Il faut encore l’enrichir, pour pouvoir le réutiliser dans nos centrales. Alors ? il est envoyé en Russie.
Russie, à Seversk en Sibérie, Complexe nucléaire de Tomsk 7 **, étape 3
Jusqu’en 2010, des dizaines de tonnes d’uranium issues du retraitement des déchets fait en France avaient été envoyées en Russie, pour la dernière étape du retraitement. La France était peu regardante sur les pollutions chimiques et radioactives engendrées là-bas, et cachées sous le tapis, c’est-à-dire dans le sous-sol des installations. Si lointaines …
Il avait fallu une campagne internationale menée par Greenpeace et un documentaire diffusé en 2009 par Arte, Déchets, le cauchemar du nucléaire pour qu’EDF annonce, en 2010, l’interruption de cette pratique.
Sauf que, depuis 2018, les échanges ont repris ( accord entre EDF et Tenex filiale de Rosatom, l'agence russe pour le nucléaire) . Ce commerce se fait dans les deux sens, puisque la France reçoit de Russie, non seulement de l’uranium retraité en France, enrichi en Russie, mais aussi de l’uranium appauvri dont la France a déjà 300 000 tonnes inutilisées.
Sous le tapis *** ?
Le journal Le Monde rapporte que: "Ces deux dernières années, de l’uranium a été envoyé de la France vers la Russie. L’ONG antinucléaire Greenpeace a documenté au moins cinq livraisons entre janvier 2021 et janvier 2022 :
- 11 conteneurs chargés dans le port du Havre, le 12 février 2021,
- 20 conteneurs chargés à Dunkerque, le 29 octobre 2021,
- 13 conteneurs dans le même port, en novembre 2021…
Le 28 septembre 2022, soit sept mois après le déclenchement de l’invasion de l’Ukraine, l’organisation révélait encore la présence du cargo russe Mikhail Dudin dans le port de Dunkerque"
EDF explique que ces échanges ont lieu dans le respect des sanctions européennes prises contre la Russie. Pas de sanctions concernant le nucléaire, à la différence du pétrole et du gaz,est-ce bien cohérent?
Alors ? On n’est même pas sûr que ce soit intéressant du point de vue économique, et il y a fort à parier que ce soit encore un désastre écologique du côté de Seversk. De plus, ce commerce France-Russie cautionné par EDF, entreprise publique, pose problème alors que la guerre de la Russie contre l’Ukraine fait rage. Dur, dur...
Suzanne Bourdet Michel Faye
*https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/nucle...
**https://www.tf1info.fr/environnement-ecologie/nucleaire-la-france-envoie...
*** https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/12/03/nucleaire-edf-a-recu-...
image BFM TV
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