Des casseroles « faiblement » radioactives dans nos futurs commerces « essentiels »?
Une annonce gouvernementale « discrète » *
Mercredi 27 janvier, le ministère de la Transition écologique en France a affirmé vouloir faire "évoluer le cadre réglementaire (…) permettant, après fusion et décontamination, une valorisation au cas par cas de déchets radioactifs métalliques de très faible activité" pour fabriquer des ustensiles de consommation courante.
Recycler une partie des ferrailles « faiblement contaminées » issues de nos centrales nucléaires pour fabriquer des rails, des poussettes ou des casseroles ? C’est l’idée du cabinet de la ministre actuelle de l’environnement, qui parle d’économie circulaire. C’était jusqu’ici interdit.
Au « bon » vieux temps, on vendait des produits de consommation courante radioactifs**
Autour de 1898 : Marie et Pierre Curie découvraient le radium et la radioactivité. Marie Curie l’utilisa à bon escient pour radiographier les blessés de la première guerre mondiale.
Les « marchands du Temple » s’en emparèrent, eux, avec des publicités qui nous semblent aujourd’hui surréalistes : rouges à lèvres Tho-Radia (photo), crèmes de beauté au radium, préservatifs phosphorescents, camembert radium, soda atomique …
Aujourd’hui, on sait chiffrer la radioactivité et les risques qu’elle comporte ***
En France, la radioactivité naturelle est due essentiellement au radon, gaz provenant de roches comme le granit. Cette radioactivité naturelle est de 2,4 millisieverts (mSv) par an et par habitant, à comparer à 1 mSv pour les examens médicaux. Le sievert est l’énergie radioactive reçue ou émise par kilogramme. Cette énergie s’accumule au cours du temps.
La réglementation française fixe à 1 millisievert (mSv) par an et par habitant la dose efficace maximale de radioactivité admissible résultant des activités humaines en dehors de la radioactivité naturelle et des doses reçues en médecine.
Les termes du débat sur le recyclage de déchets « faiblement » radioactifs*
Le Ministère de l’environnement assure que l’exposition aux matériaux provenant de déchets radioactifs serait 300 fois moins forte que la radioactivité naturelle. Jean-Marie Brom, directeur de recherche au CNRS pose la question, déjà ancienne : « Qui peut garantir qu’il n’y aura aucun risque pour vous sur le long terme? » Comme l’énergie radioactive s’accumule au cours du temps, « quand bien même la dose reçue serait très faible, c’est le temps d’exposition à la radioactivité qui compte ».
« Le procédé qui est choisi ne permet pas de faire disparaître la radioactivité. Il y a un risque assez réel que, de recyclage en recyclage, un métal qui était destiné à fabriquer un rail se retrouve utilisé à faire une carrosserie de voiture ou une casserole", dénonce Charlotte Mijeon, porte-parole du réseau Sortir du nucléaire.
Les marchands du temple vont-ils faire bientôt la promotion de casseroles « faiblement » radioactives ?
Johanna Vasconcelos, artiste franco-portugaise contemporaine reconnue, première femme admise à exposer au château de Versailles, a construit deux escarpins géants (photo) avec des faitouts, des casseroles et des couvercles. Clin d’œil malicieux sur notre représentation du quotidien. Va-t-on bientôt reproduire ces escarpins avec des casseroles « faiblement » radioactives ?
Suzanne Bourdet Michel Faye
*** https://www.laradioactivite.com/site/pages/RadioNaturelle.htm
et https://www.laradioactivite.com/site/pages/LimitesDoses.htm
Image Business Insider (**)/ Photo Michel Faye à l’exposition Johanna Vasconcelos, château de Versailles, 2012
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