Butte-Rouge, comme Blagis : sur-densification, ou rénovation respectueuse des enjeux du 21ème siècle ?
Près de Fontenay, à Châtenay-Malabry, le quartier-jardin de la Butte-Rouge, habitat ouvrier conçu à partir des années 30, a un charme certain. Mais comme aux Blagis fontenaisiens, l’âge de la Cité-jardin de la Butte-Rouge appelle instamment une rénovation. La Ville de Châtenay, dans un vaste projet, porteur de sur-densification, et de gentrification, prévoit 85 % de démolitions. Pour mener à bien ce projet, il faut modifier le PLU ; une enquête publique est en cours à ce sujet jusqu’au 11 janvier*.
Rénover sans casser ? Ou casser et reconstruire, en perdant le style si particulier de cette Cité-jardin ? Le débat** rejoint ceux que nous menons à Fontenay, et va même plus loin, puisque plusieurs associations de défense du Patrimoine*** demandent le classement de ce site remarquable par son style architectural (Bauhaus minimaliste, modèle anglais des cités-jardins) incluant de précieux espaces verts.
Un Fontenaisien soucieux du cadre de vie de chacun nous en dit plus.
Je n’habite pas la Cité-jardin de la Butte-Rouge, ni même Châtenay-Malabry, mais l’opération concernant la Butte-Rouge, objet de cette enquête publique, m’interpelle à plusieurs titres.
En effet, fréquemment, j’effectue mes courses sur l’avenue de la Division Leclerc (ancienne nationale 186 à Châtenay, en lisière de la Butte-Rouge) et me rends en forêt de Verrières, à pied, depuis Fontenay-aux-Roses. Or, afin d’éviter d’emprunter l’avenue de la Division Leclerc, bruyante, au trafic automobile intense et, durant les travaux du T10, incommode, il m’arrive souvent de traverser la Cité-jardin d’est en ouest, sur toute sa longueur, en prenant plaisir à y emprunter des chemins détournés.
En plus de son calme et de son faible trafic automobile, j’apprécie plusieurs choses dans la Butte-Rouge.
- La parfaite intégration des bâtiments et des voies de desserte dans le paysage. Je pense que l’architecture sobre, la petite taille (en emprise au sol et en hauteur) des bâtiments y contribuent grandement. Les voies, et donc les bâtiments, collent au relief, s’y fondent, donnant la primeur au paysage.
- Le paysage n’est pas banal, avec son val, son relief prononcé, ses nombreux espaces verts arborés, ses grands arbres, ses jardins familiaux, ses escaliers, ses sentes cachées, ses voies tortueuses, ses perspectives…
- L’unité architecturale, avec la reprise de plusieurs éléments dans tous les édifices et la couleur uniformément rouge des façades qui correspond à celle de la terre de l’endroit.
- Les espaces verts entre les bâtiments et les îlots de verdure.
- Les quelques grandes places qui rythment la Cité.
Sur un tout autre plan, je rajouterais le point positif suivant : de tous les autres points hauts de la région (Terrasse de Robinson au Parc Henri Sellier du Plessis-Robinson, Terrasse du Panorama à Fontenay, Parc de la Vallée aux loups à Châtenay-Malabry, Terrasse orientale du Château de Sceaux), la Butte Rouge offre une empreinte discrète sous forme de tâches rosées dans un tapis vert, à laquelle la taille et la couleur des bâtiments contribuent. Alors que le projet comporte des surélévations et des épaississements, je ne crois pas avoir vu d’étude d’impact visuel, du moins pour les sites susvisés classés.
Evidemment, il y a des choses que je n’apprécie guère dans l’actuelle Cité-jardin, du moins, du point de vue d'une personne qui la traverse.
- Il en est ainsi de la présence d’une clôture disgracieuse la séparant de la forêt, même si des ouvertures, parfois sauvages, y sont aménagées. Certaines voies de la Cité-jardin pourraient trouver une prolongation piétonnière et non empierrée en forêt.
- Même si ce n’est peut-être pas le lieu, je rajoute l’absence de lien, au moins piétonnier, entre les deux parties de la forêt séparées par l’autoroute, en dehors des deux passages routiers existant à chacune de ses extrémités occidentale et orientale et distant d’environ deux kilomètres et demi l’un de l’autre.
- Sa frange nord au contact de l’avenue de la Division Leclerc et ses ouvertures font négligées et n’incitent pas y pénétrer. Les deux immeubles parallélépipédiques, pourtant récents, situés sur la Division Leclerc sont une disgrâce de par leur teinte grisâtre et la pauvreté de leur construction. Ils augurent mal d’éventuels nouveaux bâtiments dans la Cité-jardin.
- Le mauvais entretien des trois places principales de la Cité-jardin.
- Le stationnement des véhicules sur les trottoirs le long de certaines voies, notamment dans la partie nord.
- Les abords du cimetière et la voie le séparant de la Cité-jardin auraient besoin d’un lifting.
Le projet soumis à l’enquête publique ne me semble pas, en l’absence de précisions et de prescriptions suffisantes, aller suffisamment dans le sens de la sauvegarde des éléments de la Cité-jardin positifs énumérés plus hauts.
Il en est, ainsi, des points suivants du projet :
- Concernant les bâtiments : la surélévation, l’épaississement, la reconstruction de certains d’entre eux, et le fait que cela puisse concerner un côté d’une voie, avec le risque de rompre l’unité, de réduire les espaces verts entre les bâtiments et d’endommager les perspectives depuis les autres points hauts voisins.
- La suppression de certaines voies et la "résidentialisation", qui, si je ne fais paclôturer des espaces qui peuvent être importants, sont susceptibles de compartimenter l’espace.s erreur, consiste surtout à
- Concernant le paysage : l’abattage d’arbres et l’insuffisante protection des sujets remarquables, le nivellement de certains éléments du relief, si particulier, avec son val qui mériterait, au contraire, d’être souligné avec l’exhumation du ru de Châtenay-Malabry et des rigoles affluentes issus de la forêt et du coteau. A ce propos, je me demande si le réseau hydrographique de l’ensemble ne devrait pas être revu.
- L’imprécision d’une future réorganisation du secteur du coteau ouvre le champ à tout.
Le projet ne me semble pas non plus aller suffisamment dans le sens de la correction des défauts listés plus haut.
Je note aussi l’absence d’une étude d’impact visuel depuis les points de vue classés des environs évoqués plus hauts.
De plus, ni l’Office national des forêts, gestionnaire de la forêt contiguë, ni l’Agence régionale des espaces verts, ni la Drac Île de France, compétente en matière architecturale et paysagère, ni la ville de Verrières-le-Buisson, en lisière et dont dépendent une partie de la forêt et la liaison actuelle (effectivement à améliorer) entre la Cité-jardin et la rue Jean-Baptiste Clément, ne me paraissent impliqués dans la démarche.
Enfin, s’il y a sûrement des choses à améliorer au niveau du confort des bâtiments, sujet sur lequel je ne peux m’exprimer, car n’étant pas résident, ainsi que relativement à leurs abords (propreté), cela devrait se faire, en tout état de cause, dans le strict respect de ce site remarquable en tous points.
Châtenay-Malabry fait partie du Territoire Vallée-Sud-Grand-Paris, comme la ville de Fontenay-aux-Roses. A ce titre, et compte tenu des arguments ci-dessus, j’ai déposé un avis défavorable à la proposition de modification du PLU de la ville de Châtenay-Malabry en vue de la transformation de la Cité-jardin de la Butte-Rouge.
Dominique FRUCHTER
et
*** https://chatenay-patrimoine-environnement.org/
Image : paj-mag.fr et patrimoine-environnement.fr
Commentaires
Jean-François DUMAS rédigé le Permalien
Merci Monsieur FRUCHTER pour
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