Quels états d’urgence ? quelle démocratie ?
Les états d’urgence usent la démocratie
L’accumulation d’états d’urgences (attentats hier, Covid aujourd’hui), l’absence de vrais débats au Parlement, comme l’absence de tout débat dans notre mairie, ont accru le contexte de soumission, cette soumission qui aboutit à des situations comme celles du grand âge, celles des personnels dans les hôpitaux, celle des détenus dans les prisons...
Etat d’urgence sanitaire*
A Bordeaux, face au Covid, on installe des tentes devant le CHU. Tri ? Et quel tri ? « Mardi soir, après une cellule de crise, la direction du CHU de Pellegrin, à Bordeaux, a sollicité la Protection civile de Gironde pour dresser deux grandes tentes blanches, d’une capacité de six personnes chacune, devant l’entrée des urgences. Jusqu’à vendredi matin », elles ont fait office de postes médicaux avancés sous les yeux dépités de nombreux soignants. **
« Pour éviter que les gens ne meurent devant les urgences ou dans les couloirs des urgences – ce qui est déjà arrivé ces derniers mois – on a décidé de faire de la médecine de catastrophe, avec les outils de la médecine de catastrophe", justifie auprès de BFMTV Aude Grigoletto, médecin urgentiste, membre du collectif "Urgences Bordeaux »*.
L’accès aux soins pour tous suppose des moyens matériels et humains, l’hôpital n’est pas une entreprise, c’est un lieu de solidarité nationale.
Etat d’urgence dans les prisons**
Cet état d’urgence-là n’est pas décrété par l’Etat. C’est la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, Madame Somonnot, qui lance l’alerte. Les conditions dégradées et dégradantes des prisons françaises ont été plusieurs fois dénoncées par l’Europe. Or, certaines surenchères électorales demandent toujours plus de peines de prison.
Sauf que, à moins d’enfermer à vie, la question incontournable est la suivante : comment assurer la réinsertion des personnes emprisonnées lorsqu’elles sortent de prison ? Fresnes (94) la prison la plus dégradée d’Ile-de-France ; Fleury-Mérogis (91), la prison la plus grande d’Europe ; Villepinte (93), record de surpopulation (jusqu’à 200%). Malgré les déclarations d'intention, rien n'a changé.
Surpopulation aggravée (on a désengorgé les prisons par ordonnance au début de l’épidémie de Covid, mais augmenté la population carcérale de + 15 % en 2021). Soumission aux rats, cafards, punaises de lit. Manque d’hygiène, manque de soins médicaux, un surveillant pour 53 détenus il y a quelques années, un pour 150 aujourd’hui. Soumission aux violences entre détenus, et entre détenus et surveillants.
Or les conditions d’une détention influent forcément sur les comportements à la sortie. « A 105 euros la journée, cela fait un peu cher pour fabriquer de la récidive**. » Faut-il un scandale ou une épidémie pour que l’on repense le couple prison-réinsertion dans l’intérêt de la société elle-même.
Etat d’urgence dans les Ehpad***
Nous en avons parlé dans deux blogs récents***, citons un quotidien de province du 27 janvier 2022 :
Dans le monde économique, il n’est pas rare d’entendre dire que les Ehpad, ces établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, constituent de véritables « vaches à lait ». Leur modèle facilement « industrialisable » et leur forte rentabilité ont permis aux entreprises françaises Orpéa et Korian de grossir d’année en année et d’attirer les investisseurs en bourse.
Ehpad, hôpital, prison, quelle image donnent-ils d’un pays qui fût grand, mais s’est soumis aux diktats de « rentabilité » au point d’y perdre son âme. Parlementaires, magistrats, élus locaux, allez passer un jour dans chacun de ces établissements, au plus près des personnes dépendantes, des malades, des détenus, et des personnels, sans complaisance et sans écran de fumée. N’attendons pas qu’un journaliste publie un livre accablant de plus****.
Suzanne Bourdet Michel Faye
** https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/02/07/dominique-simonnot-parle...
*** http://www.pourfontenay.fr/blog/nos-amis-reduits-aux-ehpad
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