Dis-moi comment tu te chausses/ Les baskets entrent au musée
Inégalité femme-homme par les chaussures
Du 10ème siècle jusqu’au début du 20ème siècle, filles et jeunes femmes chinoises se bandaient les pieds, pour accroître d’abord, dit la légende, le désir d’un empereur, puis plus largement comme signe (non-dit) de soumission des femmes au diktat de leur genre. En Chine donc, on commençait à bander les pieds des petites filles dès l’âge de 5 ou 6 ans, tant la petite taille des pieds favorisait le mariage des jeunes femmes avec un homme plus fortuné. Les femmes mandchoues ou mongoles, beaucoup plus actives, en particulier très bonnes cavalières, ne se bandaient surtout pas les pieds, mais elles confectionnaient des chaussons destinés à leur donner la démarche chaloupée des femmes aux pieds bandés.
Dans son ouvrage Les cygnes sauvages*, l'écrivaine chinoise Jung Chang raconte l'histoire de trois générations de femmes dans la Chine du 20e siècle. Petite-fille d'une concubine et d'un Seigneur de la guerre , fille de hauts responsables communistes, médecin aux pieds nus, exilée à Londres depuis 1978, Jung Chang évoque sa grand-mère qui subit la pratique des pieds bandés « trottinant sur ses pieds atrophiés …démarche censée avoir un effet érotique sur les hommes, cette vulnérabilité manifeste provoquant, disait-on, chez la gent masculine des sentiments protecteurs ».
Ce fantasme peut s'apparenter au port des talons hauts en occident, icônes fétichistes ou stéréotypes dérisoires. Il existe aux Etats-Unis, et parfois en Europe, une course ( Stiletto Run) dans laquelle des femmes et à présent des hommes courent en talons aiguilles, et les chutes des candidats et candidates amusent le public. Bon, on évolue quelque peu, l’argent recueilli est versé à des associations caritatives, comme l'Alliance nationale contre le cancer de l'ovaire**.
Un pied vers l’égalité femme-homme/ Et une exposition au musée de l'Homme à Paris
En 1839, Charles Goodyear inventa la vulcanisation du caoutchouc (addition de soufre au caoutchouc végétal) ; en 1917 , fut créée la première basket avec une semelle en caoutchouc, la “Keds” . Les chaussures de sport d'aujourd'hui (baskets, tennis, sneakers) sont devenues le symbole d’une affirmation sociale et culturelle. Accessoires de mode ou synonyme de liberté et d’émancipation, elles transcendent le genre, l’âge et les milieux socio-culturels.
Les grandes marques américaines de sneakers sont apparues après la 2ème guerre mondiale, popularisées par les danses de rue , hip-hop notamment, par le cinéma … Même le monde du luxe s’y est mis. En 2018, le marché mondial a atteint 85 milliards de dollars. Au point qu’une exposition les met à l’honneur « Sneakers, les baskets entrent au Musée », une exposition que l’on peut voir en famille (profitez des vacances scolaires) au Musée de l’Homme, à Paris***. Sneaker vient de l’anglais to sneak qui signifie “se déplacer silencieusement” (grâce aux semelles en caoutchouc).
Mais on fait mieux aujourd’hui, en créant des baskets éco-responsables ( notre blog du 5 avril 2021)****. Marche en souplesse pour tous, femmes et hommes.
Suzanne Bourdet Michel Faye
* Les cygnes sauvages, autobiographie de Jung Chang, éditions Pocket
** https://www.buffalorising.com/2016/07/the-stiletto-run-2016/
*** https://www.mnhn.fr/fr/exposition/sneakers-les-baskets-entrent-au-musee
Et https://www.museedelhomme.fr/fr/horaires-tarifs-acces-2718
**** http://www.pourfontenay.fr/blog/quel-monde-voulons-nous-suitedes-baskets...
Image 1 : https://relocos.fr/les-pieds-bandes-casse-pieds-ces-empereurs-chinois.ht...
Image 2 : Livre Les cygnes sauvages, de Jung Chang, éditions Pocket
Image 3 : https://fr.ulule.com/iko-nott/
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